Christian Magloire est un contributeur régulier de Politiques Publiques. A la différence des tribunes qu’il publie sur des thématiques politiques ou sociétales, c’est à travers ce poème qu’il a réagi à l’actualité liée aux trafics de drogue qui ont vu se succéder de nombreuses interpellations de jeunes martiniquais.
DETRESSE
Il est jeune, il s’est fourvoyé dans les méandres obscurs
d’un paradis chimérique dont il ne peut se soustraire.
Il tue son désespoir dans les vapeurs psychédéliques
de l’aspiration d’un monde qu’on lui refuse.
Il noie sa furieuse solitude avec ses frères de déshérence,
cherchant de-ci de-là le nuage mirifique qui l’oblitérera
des regards assassins des gens qui fuient devant lui.
Sa mère crie le chagrin de son impuissance, nommant ses bourreaux
et leurs complices sans qu’on ne l’écoute , sans qu’on ne l’entende.
« ils sont là , on les voient, regardez les! dit-elle.
Ils se pavanent sur les places des nantis, ceux qui livrent le souffle,
la faiblesse, la détresse de mon fils aux bonheurs des marchés,
ces cerbères respectables, ces voyous en col blanc. «
Il s’enfonce dans la nuit sans fond de la déchéance compulsive
qui l’aspire dans les profondeurs de la déshumanisation au gré de ses déambulations.
Il voit le regard moqueur de ses frères ; oublieux des serments fraternels jadis prononcés
quand il était de leur monde annihiler ses désirs d’y retourner un jour.
Il regarde son ami de toujours poser sur lui un regard fuyant,
ne voulant pas être vu afin de ne pas perdre le piètre privilège
d’être accepté des autres, fiers de la vanité de leur reconnaissance sociale.
Il vit de ses tourments, de ses errements, de ses regrets d’avoir
un jour pénétré ce monde qu’il exècre sans pouvoir ni savoir comment en sortir.
Il hèle sa souffrance aux passants qui tantôt le fusillent d’un regard accusateur,
tantôt généreux lui tendent une pièce pour essayer de l’aider à ne pas plonger
à nouveau dans les espaces fumeux de l’oubli de son existence.
Il est pour lui-même mort aux yeux du monde, mais vit le tourment
de comprendre dans ses instants de réminiscence, l’atavisme volontaire
qui le force quelquefois à réagir à sa lente descente aux enfers.
Sa main n’a plus l’espoir de faire vivre dignement son corps,
il ne peut malgré lui refuser de mendigoter quelques pièces
pour plonger encore plus près du tréfonds du néant.
Il cherche dans la noirceur de sa nuit sans lune une étincelle de lumière
dans le regard transparent des gens sourds à sa détresse, un rayon de lumière
Qui lui donnerait espoir de vouloir chercher la sortie de ce labyrinthe.
Il aimerait se réveiller de ce cauchemar qui l’enchaîne dans une inexorable désespérance
et l’incarcère
dans les oubliettes d’un monde indifférent à la misère d’autrui.
Il déambule, il s’en va loqueteux traînant son agonie sur les trottoirs
de son destin miséreux pour s’éteindre en silence , oublié de tous.
Amène lui, oui toi ! Amène lui un regard humain, un sourire qui l’aidera à
s’en sortir, ou s’en aller avec son humanité un instant retrouvé
avant qu’il ne parte vers l’amen s’il en est ainsi.
Christian MAGLOIRE
« ils sont là , on les voient, regardez les! dit-elle.
Ils se pavanent sur les places des nantis, ceux qui livrent le souffle,
la faiblesse, la détresse de mon fils aux bonheurs des marchés,
ces cerbères respectables, ces voyous en col blanc. «
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Sé kokayin ki ka fè krak, ki ka mété jennès péyi mwen adan voukoum tala ! Petites mains … y a pas de petites mains. Y a juste des isalop ki pa mantjé mélé avec le sort des autres; lajan sé sèl mèt yo !!!! Maché Fodfwans tibren pou wè …
Chapeau Monsieur Magloire!!!!
pour votre texte réaliste, beau, humaniste et charitable, vous m’avez émue et fait venir les larmes aux yeux…..
Je pense comme vous que les personnes qui se droguent méritent plus notre pitié que notre mépris car elles restent des être humains malgré tout et qu’il faut leur tendra main. Notre colère doit être réservée par contre à ceux qui font commerce de ce type de produits.